08 mars 2008

Sans repères

Il y a un peu plus d'un an, ma grand-mère paternelle vendait la maison familiale. Malgré le fait que tous étaient d'accord pour dire qu'elle n'avait plus la capacité de l'entretenir, ça nous a tous fait un pincement au coeur de comprendre que cette maison remplie de souvenirs ne serait plus nôtre.

Le coin dans la cuisine où, petits, nous nous amusions entre cousins-cousines. Le grand salon double, qui m'a servi de chambre à coucher tant de fois quand j'allais passer le week-end là-bas. Le grand jardin, dans la cour arrière, qui faisait le bonheur de tous les membres de la famille aux temps des récoltes. Cette place, au bout de la table de la cuisine, occupée jadis par mon grand-père alors que nous déjeunions en tête-à-tête, en chuchotant pour ne pas éveiller la maisonnée. Le point de rassemblement de la famille élargie dans le temps des fêtes. Ces lieux qui ont aussi vu mon grand-père nous quitter brusquement, il y a maintenant plus de vingt ans.

Ce n'était pas seulement ma grand-mère qui quittait sa demeure, mais la famille au grand complet.

Et voilà que ce soir, j'apprends que mon grand-père maternel a vendu la maison. Un autre point de repère qui s'efface. J'ai tellement passé de temps dans cette maison-là, petite, que ça m'accable de savoir qu'elle passera à d'autres mains. Ma grand-mère est décédée dans cette maison, et malgré ce que certains peuvent en penser, j'ai toujours eu l'impression qu'elle occupait toujours les lieux, malgré toutes ces années. Et j'aimais ça aller faire mon tour là-bas, juste pour la sentir vibrer de temps en temps.

C'est là qu'on se rend compte à quel point le temps passe. Mes grands-parents n'ont plus les capacités physiques, ni l'envie, de s'occuper d'une grande maison vaste qui ne se remplit qu'une ou deux fois par année.

Et puis, quand je pense que mes parents songent aussi à vendre la maison dans quelques années, histoire de se rapprocher de leurs enfants expatriés, ça aussi ça me rend triste. Parce que c'est la maison de toute ma vie. C'est là que je suis née et que j'ai grandi. J'en connais les moindres détails... la troisième marche de l'escalier qui craque quand on y pose son pied, la porte de ma chambre qui ne ferme pas complètement quand l'été arrive, l'immense cour arrière qui réussit à m'extirper de mon quotidien de mongol. Tout ça se terminera aussi d'ici peu.

J'ai l'impression que tous mes repères s'effacent un à un. Je sais bien que ce n'est pas un lieu qui nous définit en tant que personne.

Je crois que c'est surtout l'évidence que la vie coule, le temps passe et tout ce qu'on croyait immuable finit par changer.

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